MONITORING

Le couplage entre enceinte et studio

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Nous avons vu dans les précédents chapitres le côté "scientifique" du fonctionnement d'une enceinte acoustique à travers l'interprétation de sa courbe de réponse.

Même si une enceinte peut paraître parfaite sur le papier, nous allons voir qu'il n'en est rien sans un local totalement adapté à elle. En effet, sa courbe d'origine peut être totalement "modifié" juste avec l'influence du local.

Couplage acoustique

Dans cet article nous allons voir les principaux phénomènes acoustique qui peuvent influencer sur le couplage entre l'enceinte et le studio. Vous avez sans doute lu des règles "statistiques" qu'il existe pour minimiser certains de ces phénomènes mais il faut bien comprendre que chaque cas est différent.

Ce qui peut être vrai dans une situation ne le serait pas dans une autre. Voilà pourquoi il est primordial de pouvoir comprendre comment fonctionne ce principe de couplage entre vos enceintes acoustiques et votre studio.

L'influence du local

Réponse dans le grave, couplage physique

Dans les fréquences graves (en dessous de 200Hz), la courbe de réponse de l'enceinte est complètement tributaire du local d'écoute. L'enceinte transmet plus ou moins d'énergie en fonction de son type, de la dimension du local et de son positionnement dans ce dernier. Ceci est observé sur certaines enceintes qui génèrent un grave très typé, qui peut plaire, mais n’est pas transposable à d’autres systèmes.

Il s'agit là d'un phénomène d'adaptation d'impédance acoustique entre le générateur (l'enceinte) et le récepteur (local), aggravé par la présence d'ondes stationnaires dans la cabine. La courbe de réponse de l'enceinte devient donc très irrégulière.

Par conséquent, seul un traitement acoustique adapté et un réglage par égalisation électronique additionnel permet d'obtenir une courbe de réponse plate et régulière au point d'écoute dans cette plage de fréquence.

Si on désire augmenter la zone d'écoute (sweet spot), on devra atténuer les ondes stationnaires du local par un traitement adapté. Des solutions plus ou moins complexe existent suivant le budget et le volume disponible.

Le niveau de grave physique etpsycho-acoustique d’une enceinte

Les mesures habituelles :

Les constructeurs ont l’habitude de mesurer le grave des enceintes en champ libre (c'est-à-dire, en dehors de tout environnement de salle). Ces mesures sont effectuées en bruit rose à 1 ou 2 m suivant la taille de l’enceinte ou encore en proximité du haut parleur de grave. On s’attend donc à retrouver ces caractéristiques dans notre environnement propre, ce qui n’est que rarement le cas !

Les mesures ci-après d’une même enceinte dans plusieurs lieux illustrent bien cette constatation.
  • La courbe rouge est la mesure en champ libre d’une enceinte de monitoring 2 voies fournie par le constructeur à 1m.
  • La courbe bleue représente la même enceinte mesurée dans une petite cabine de montage au point d’écoute.
  • La courbe orange est mesurée dans la même cabine, mais les enceintes ‘collées’ au mur.
  • La courbe verte correspond à la mesure de la même enceinte dans une régie plus grande.

Nous pouvons constater des différences de niveaux pouvant atteindre plus de 25 dB entre les différentes configurations d’écoute et les différents lieux !

L’explication de ces divergences réside dans l’adaptation d’impédance au local. En effet, l’enceinte est un générateur qui transmet son énergie au local, celui-ci jouant le rôle d’un récepteur. L’adaptation d’impédance est optimale quand l’impédance de rayonnement du HP est égale à celle de l’air.

En champ libre, l’air possède une impédance très faible, mais constante en fonction de la fréquence. L’énergie transmise est donc linéaire et la courbe de réponse régulière. Par contre, dans un local, l’impédance acoustique de l’air varie en fonction de la taille du local et de sa forme (ondes stationnaires), induisant de très fortes variations dans la courbe de réponse effective ...et donc perçue !

Adaptation des impédances acoustique

Pour illustrer plus simplement ce phénomène, on pourrait imaginer le HP comme une rame et le local comme la rivière. Suivant que la rame trempe plus ou moins dans l’eau, le bateau avancera plus ou moins vite.

Dans un grand local, la rame est peu immergée alors que dans une petite salle, celle-ci l’est beaucoup plus. (Ce qui explique qu’il y ait du grave dans un casque, le ‘local’ étant très petit !).

En fonction de la fréquence, la rame trempera plus ou moins dans l’eau et donc générera une courbe de réponse très irrégulière dans le grave. Dans l’aigu, le phénomène s’atténue progressivement et on se retrouve en conditions de champ libre, la salle devenant très grande comparée aux longueurs d’ondes faibles des fréquences élevées.

Si on veut une écoute neutre, il est donc particulièrement nécessaire d’adapter au mieux l’enceinte au local soit par traitement acoustique, soit par correction électronique in situ ou les deux.

Penser obtenir une courbe droite spontanément dans un lieu donné est donc complètement hasardeux, comme d’espérer gagner le gros lot au loto en achetant un seul billet !!

Les mesures avancées :

Un autre phénomène intervient sur l’impression subjective de grave, enplus de la courbe de réponse in situ. Il s’agit du retard relatif entre lesfréquences graves et le médium-aigu.

En effet, la mesure du temps de propagation de groupe (retard relatif en régime harmonique), effectuée à partir de la réponse impulsionnelle montre des divergences importantes d’une enceinte à l’autre.

Les mesures en champ libre ci-dessus illustrent bien ce propos.

Les enceintes A, B & C sont représentatives de modèles monitoring 2 voiesréputés en prise de son et mixage. Les courbes de réponse en champ libre sonttrès voisines mais à l’écoute les utilisateurs trouvent le grave de chacune trèsdifférent.

La quatrième enceinte est la Zéphyr de la marque Prosodia, mesurée en version de base et après correction électronique. Cette correction a été guidée et validée par des ingénieurs du son après utilisation pratique en prise de son et mixage afin de rendre compatible l’écoute par rapport au parc d’enceintes existant.

En effet, le retard dans le grave de beaucoup d’enceintes apporte undémasquage de cette partie du spectre en séparant le corps du signal del’attaque, ce qui donne une texture particulière à laquelle l’ingénieur du son esthabitué et ce qui est un défaut dans l’absolu, mais qui doit être pris en compteafin d’assurer la transportabilité du mixage d’une manière statistique jusqu’auclient final. Ainsi, il s’est avéré nécessaire de respecter cette caractéristique surles Zéphyr et de corriger électroniquement le retard de celle-ci selon la courberouge ou bleue suivant le type de production.

Pour un mixage acoustique de type classique ou jazz, le retard nécessairea été fixé à 15 ms pour 50 Hz. Pour un mixage plus variété ou contemporain, leretard atteint 26 ms à cette même fréquence et la courbe de réponse estvolontairement accentuée de 4 dB à 50 Hz. Ces valeurs ont été déterminéesexpérimentalement par comparaisons auditives en fonction des habitudesd’exploitation des ingénieurs du son.

Un commutateur situé à l’arrière de l’enceinte permet de passer d’une configuration de grave à l’autre, ce qui permet une grande souplesse d’utilisation. D’une manière générale, on utilisera de préférence la position ‘variété’ pour une grande cabine et / ou en mixage de type ‘électronique’. La position ‘classique’ sera bien adaptée à une petite cabine et / ou en prise de son de type ‘acoustique’. Le choix est alors personnel, mais parfaitement conscient !

Les ondes stationnaires

Une autre variable influe aussi sur le rendu du grave. Il s’agit de laprésence des ondes stationnaires du local. Ce phénomène est bien connu pourmodifier la courbe de réponse en niveau dans cette partie du spectre. Mais lesondes stationnaires modifient également le retard subjectif à certainesfréquences, engendrant des effets de traînage et de relaxation qui peuvent êtretrès important. Une bonne analogie est d’imaginer des ressorts invisiblestendus entre les différentes parois du local. Ces ressorts, une fois sollicitéscontinuent à vibrer à des fréquences déterminées par la raideur et la longueurde ceux-ci : le son a du mal à s’éteindre rapidement !

La solution la plus élégante est d’atténuer fortement celles-ci à l’aide d’un traitement acoustique sur mesure, souvent assez onéreux. Une autre solution sui peut être très efficace, est de procéder à une égalisation électronique précise en envoyant dans l’enceinte la correction en amplitude ET en phase correspondante au point d’écoute afin de s’opposer au « mouvement du ressort ». L’opération, quand elle est réalisée avec précision, est extrêmement efficace mais suppose une intervention in situ avec des appareils de mesure (type MLS) et des processeurs numériques performants.

Cette optimisation n’est bien sûr opérationnelle qu’au point d’écoute, pourl’ingénieur du son.

La mesure en ondelettes ci-après illustre bien ce phénomène.

Cette mesure a été réalisée dans une petite cabine de montage et mixage broadcast. La couleur représente le niveau en dB, l’échelle verticale indique la fréquence en Hz et l’échelle horizontale mesure le temps en ms. On voit nettement le traînage vers 100 Hz qui atteint 170 ms !

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