Visite aux studios Davout
Difficile de décrire en quelques lignes les sensations que l’on peut ressentir lorsque l’on franchi les portes d’un studio comme celui des studios Davout. Un lieu chargé d’histoire et considéré comme le temple du son par tous les professionnels.
Il me paraissait évident pour mon premier épisode des « studio tour » de consacrer un article et une vidéo sur ce lieu emblématique qui restera dans la mémoire des passionnés de son que nous sommes. Ce n’est plus un secret pour personne aujourd’hui, nous savons que la fin de cette aventure incroyable prendra fin début avril 2017.
J’ai passé une journée avec Jean Loup Morette, ingénieur du son au studio Davout depuis plus de 35 ans, j’ai laissé tourner deux caméras et nous avons parlé. Une discussion riche et inspirante qui j’espère vous fera réaliser ce que sont les studios Davout, pour ceux qui n’ont pas eu la chance de le connaitre.
L’histoire
Nous sommes au début des années 60, dans les studios, on enregistre en mono ou en stéréo. On ne pouvait à peine enregistrer sur 3 pistes. Seul Barclay possédait ses studios avenue Hoche et Decca rue Beaujon. Il était difficile de trouver des lieux adaptés à la prise de son d’orchestre, on faisait ça un peu n’importe où. On compte très peu de studio indépendant, parmi eux : Geneix et Europasonor.
En 1964, Yves Chamberland déjà à l’origine du studio Europasonor, se met en quête d’un lieu pour abriter un studio d’enregistrement destiné aux compositeurs de musique de film et au mixage cinéma. Il porte son choix sur un ancien cinéma porte de Montreuil et se lance dans les travaux.
En Juin 1965, c’est au côte de l’ingénieur du son Claude Ermelin que Yves Chamberland ouvre les porte des studios Davout. Deux cabines sont alors en place, dont le studio A avec ses 22 mètres par 16 au sol et ses 9 mètres de plafond ! Un projecteur 35mm est à disposition pour les musiciens et le chef d’orchestre. On y enregistre beaucoup de musiques de films notamment pour Michel Legrand qui fut un grand fidèle du studio, ainsi que les 45 tours de variété et des disques de jazz… On mixait les musiques de films en conditions cinéma : haut parleurs derrière l’écran avec un projecteur 35 mm.
A Davout, on fabrique le matériel qui n’existait pas ! La première console compte 20 entrées et 4 bus, suivi d’une 32/24 à monitoring séparé. Yves Chamberland à rapporté des Etats Unis des compresseurs Fairchild, ou encore des reverberations à plaque EMT. Mais la vrai innovation est la construction de caves recouverte de carrelage ! L’idée est d’envoyer le son des reverbs à plaque d’une durée de 2 secondes dans la reverb naturelle et de revenir sur la console. On obtenait des durées pouvant aller jusqu’à 3 secondes, ce qui était révolutionnaire pour les musiques de films ! Parmi les premiers à en bénéficier : « Les grandes gueules » de François de Roubaix, suivi par tous les Truffaut, les Oury… et parmi les plus connues « Les demoiselles de Rochefort » de Michel Legrand.
L’évolution
Ces prouesses technologique attirent les musiciens curieux, les séances s’enchainent, on y fait beaucoup de 45 tours et parfois des albums de jazz en 2 jours ! Très peu de mixage se faisait à l’époque. Davout a été parmi les premiers à proposer les enregistrement sur 3 pistes : On enregistrait l’orchestre et la voix ensuite. Si on voulait plus de pistes, on couplait plusieurs magnétos les uns aux autres…
A cette époque, on fabriquait ses consoles soi-même d’une année sur l’autre pour avoir plus de tranches et de souplesse et suivre l’évolution des magnétophones : du Ampex 3 pistes, on passe au Studer J37 4 pistes puis au Scully 8 pistes, puis les 16 et les 24 pistes. Les américains s’intéressent à Davout et la BO de « L’affaire Thomas Crown » y est enregistré et sera récompensé par un Oscar.
L’équipe d’ingénieurs du son s’agrandit, citons parmi eux René Ameline qui fondera les studios Ferber en 1972.
Dans les années 70, d’autres cabines viennent compléter les deux premières, dont une cabine de mixage signée Tom Hidley avec sa cambre d’écho naturelle en marbre ! Les consoles maison laissent place à des consoles du commerce. Les Scully sont en 16 pistes et les 24 3M sont partout. Le gratin de la variété vient enregistrer à Davout : Henri Salvador, Claude François, Pierre Perret, Laurent Voulzy, Alain Souchon et bien d’autres…. A cette époque Davout était l’un des deux ou trois studios les plus gros de Paris. Le studio A avait une console Raindrik équipé de pré-amplis et EQ API puis ensuite évolue sur une MCI. Le studio B avait une console plus 30 et les autres des Cadac. Tous équipés de deux 24 pistes analogique.
Les années 80 voient arriver le règne des consoles SSL et des multipistes numériques. Davout suit la technologie et équipe ses studios. Le passage à SSL et aux 3324 standards, provoque l’arrivée d’artistes étrangers : de Sakamoto à Sly & Robbie en passant par Al Di Meola. Le groupe Anglais Duran Duran y vient « jammer » pendant un mois. Ils reviendront deux ans plus tard enregistrer leur album « Big Thing » pendant 6 mois dans le studio B refait pour l’occasion avec une grande SSL.
Dans les années 90, Olivier Kowalski succède aux Putti et à Yves Chamberland et entreprend des travaux d’aménagement et de rénovation : nouvelle dalle, nouveau parquet, couloir d’accès, salle de repos et l’arrivé de la 9000 dans le studio A. De nombreuses pointures françaises du son arrivent successivement et travaillent avec des clients illustres comme les Rolling Stones ou Prince. L’arrivé du premier protools introduit par Hubert Salou permet de réaliser une séance de montage pour U2 !
Davout n’a pas échappé à la crise du disque dans les années 2000 mais il a toujours été en constante évolution depuis ses débuts. Des consoles maisons aux grandes SSL, et du 3 pistes au standards sony 3324 et 3348HR et bien sûr les Pro Tools. La 9000 J puis XL, l’écoute en 5.1 Boxer. Les ingénieurs du son et assistant sont restés fidèles aux lieux : 40 ans de collaboration avec Claude Ermelin et plus de 35 ans pour Jean Loup Morette.
No comprendo Miguel Benavides
?
Et dans le même temps s’ouvrent des plus petites structures dont certaines misent sur l analogique de qualité … et le pari est gagnant car des studios tournent bien. De son côté l’industrie technIque s’est repositionnée et les fabricants de grosses consoles font désormais essentiellement du matériel destiné au marché Broadcast . Et pour le coup , il y a des machines très abouti chez SSL ou Calrec par exemple . La musique a repris la route du live et c’est tout de même la première vocation d’un artiste de rencontrer son public , non ? Donc show must go on !
Oui c’est ça et les micros rares surtout 😉
Non ils gardent les périphériques. ..et autres équipements. …pas les vonsoles
Quoi qu’il se passe pour la suite, ça ne sera forcement pas de la même envergure
londe
Ouais demandez lui
Je vais lui en parler et je vous tiens au courant, ok ?
Yep je suis d’accord moi aussi
Je dirais même qu’il doit être un des personnages principaux!
Miguel Benavides et Frances Feeny vous devriez interviewer Jean Loup M pour #Lockout !
Pourquoi vendent-ils la XL ..? Ils ne doivent pas se réinstaller ailleurs ?
Oups , je n’avais pas suivi ton lien ce matin , mais je viens de voir que cet article y était , c’est bien triste tout ça …
Je ressens les choses exactement comme toi, je n’ai pas grand chose à ajouter…
Oui la xl est en vente. …a un prix hyper intéressant. …non la mienne est l’ancienne du studio A du studio Delphine
Tu peux le dire oui d’ailleurs la XL est en vente 🙁 la 4K c’est celle que tu as actuellement ?
J’ai eu la chance de connaître ce studio lors de la pose de la 9000J en 1997…..j’avais acheté la 4064g du Â. ….impressionnant !
Merci Serge je suis tout à fait d’accord avec toi….
Article touchant. ….teinté d’amertume et de regrets. …la fin d’un palais de la musique enregistrée. ….un peu plus du patrimoine français de la musique qui disparaît. ….
J’ai eu le plaisir d’acheter la ssl 4064G du studio À en 1997. Cet endroit est magique. ..un palais du son….l’histoire de la variété française et bien plus encore.. . Ce patrimoine est simplement démoli. .fini….on enterre un peu plus l’histoire de la musique enregistrée. …
Avec un immense plaisir 🙂 !!!!
Je viendrai chez toi bientôt Paul Viguier quand tout sera fini 😉
😉
Merciiiiiiiii !!!!! 🙂
Merci, je dis rien mais un truc plus officiel va voir le jour prochainement et ça risque d’être beaucoup plus riche 😉
Bravooooooo !!!!!!!!!
J adore se genre de reportage charger d histoire et d anecdote trop trop bien Nicolas merci
C’est malheureusement de plus en plus compliqué dans le contexte économique actuel
Salut , il y a peu de temps je suis tombé sur cet article , que doit-on en penser ? http://culturezvous.com/les-studios-davout-50-ans-dhistoires/